Advaitisme de Dieu
Comment définir le concept de base de la pensée
hindoue. J'ai lu quelque part que lorsque l'on ne sait définir une
chose il est prudent de commencer par définir ce qu'elle n'est pas.
Commençons peut être par ébranler le mur de l'opposition
entre panthéisme ou monothéisme et polythéisme, construit
patiemment par les occidentaux pour rejeter l'Hindouisme au rang des fétichismes
divers. Celui qui croit en la vérité de la Bible conçoit
Dieu comme le créateur, éternel et extérieur à
sa création. Nous sommes des entités distinctes crées
(par définition à un moment donné), espérant
l'immortalité à ses cotés si nous respectons les règles
de comportement qu'il nous a édicté et lui faisons allégeance.
Ensuite les opinions divergent (si j'ai bien compris) en ce qui concerne
notre devoir dans la relation Père-fils (fille) qui nous unit. J'entends
par là notre conception du respect filial, les libertés que
nous pouvons prendre, notre expression de l'Amour qui nous unit (Sa volonté
de nous sauver pour les Chrétiens). Car c'est d'Amour qu'il s'agit
n'est ce pas? Les athéistes vous diront que nous créons Dieu
comme un remède à la solitude. Cette "connaissance"
n'est pas non plus tout à fait fausse. Mais pour nous croyants ce
n'est qu'une partie de la vérité. Une des légendes
rapportée dans le Bhaagavata Puraana à propos de la création
m'est apparue très savoureuse et les fables renferment elles aussi
une part de vérité. L'Esprit Universel aurait pensé
"Je", inventant par la l'Ego, et poursuivi en pensant qu'Il était
seul, d'où sa volonté de se multiplier pour y remédier.
Un concept de base de la pensée Hindoue est que Dieu est indivisible
(advaita), indifférent au Temps et que nous sommes
de même nature que lui, ce qui peut vouloir dire que nous faisons
toujours partie de Lui ou qu'il cherche à nous unir à Lui.
J'ai écrit Temps avec une majuscule intentionnellement car le Temps
est une de Ses créations. Dieu n'existe pas de tous temps mais dans
l'instant et Il recrée les cycles de temps (appelés Kalpa
et Yuga) selon son bon vouloir. L'histoire n'est pas écrite une fois
pour toutes mais réinventée en quelque sorte d'une Kalpa à
l'autre ou d'un Univers à l'autre. Nous reviendrons sur ce caractère
temporaire de la création dont l'idée n'est pas étrangère
à la conception de la Bible et ne fait somme toute que généraliser
notre perception du caractère temporaire et cyclique de la Vie (en
incluant le jour et la nuit, les saisons etc..). Ensuite il existe plusieurs
cosmologies qui conduiraient certains à définir l'Hindouisme
comme un panthéisme ou un monothéisme (conception des Veda
ainsi que de la philosophie Samkia ). Pour ne citer que le Bhaagavad Gitaa
(Chant de Dieu- shloka 7-6)(2):
Bhagvan uvacca "Aham kutsnasya jagatam, prabhavam payalas tathaa"
ce qui veut dire: Dieu dit "je suis le Tout, source
de toute manifestation et de toute destruction".
Il est plus que l'Esprit Suprême et l'Univers ou les Univers, tous
deux font partie de Lui et il est plus encore, hors de notre imagination.
De tous temps les Aryens (3) ont cru en un Dieu
unique tout puissant et ont cherché à lui "donner"
une personnalité, car l'intangible est frustrant pour notre esprit
limité. Dans les Veda, le Seigneur est successivement l'Ether, le
Ciel, la Terre (le premier vers de la Gayatri mantra- Om Bhu Bhuva Swa-
en est une réminiscence si elle ne signifie pas exactement cela
pour un esprit un peu plus évolué- voir annexe sur les textes
sacrés). Pour exprimer les choses de façon un peu simpliste,
Bhaagvan étant Tout, rien n'interdit de prier le dieu de la Guerre
(Inra), le dieu des eaux (Varuna) ou le dieu du feu (Agni), la déesse
Nature (Uma, Parvati ou Durga, d'essayer de se concilier le dieu de la destruction
(Shiva) ou celui de l'ordre cosmique (Vishnu). Le principal est de savoir
qu'ils prêtent tous allégeance au Tout Puissant et sont eux
même soumis au cycle des créations. Le dieu chargé de
l'achèvement de la création de l'Univers matériel,
Brahmaa, ne vit lui même que le temps de 300.000 milliard d'années
selon mes calculs (en équivalents d'années humaines).
Le Tout Puissant ne voit rien à redire à ce que nous adorions
un demi-dieu ou un saint, nous rappelant cependant qu'il est le réel
Acteur derrière cette divinité/saint et qu'il faut toujours
mieux s'adresser à Dieu qu'à ses saints:
yo yo yaam yaam tanum bhaktah
shraddhayaarcitum icchati
tasya tasyaacalaam shraddham
taam eva vidadhaamy aham|
sa tayaa shraddhayaa yuktas
tasyaraadhnam ihate
labhate ca tatah kaamaan
mayaiva vihitaan hi tan
(Bh. 7-21,22): J'affermi la foi du dévot quel que soit le dieu qu'il souhaite prier. Inspiré par moi de cette foi, il obtient ce qu'il désire. Mais le résultat de son vœux il me le doit.
note 2: Gitaa et gaanaa signifiant chant étant
du genre masculin en hindi et en français, j'ai adopté l'article
masculin le. Pour d'autres termes tel que jiva (conscience), bien que la plupart
des noms hindi finissant en a soient du genre masculin, j'ai adopté
le genre du mot français, n'étant pas expert en sanscrit, langue
du texte original. Les citations sont en sanscrit.
note 3: Les Aryens, originaires d'Asie Centrale, auraient
migré ves l'Anatolie, l'Iran et l'Inde au cours du 2eme millénaire
avant l'Ere cherétienne. Ils auraient parlé une langue "indo-européenne
dont on peut retrouver de nombreuses traces dans la structure des phrases
et la racine des mots en Sanscrit et en Persan. Un exemple est le nom de Dieu,
qui s'est appelé Dyaus en Indo-Iranien au début du temps des
Veda et deva en hindi (utlisé pour les dmei-dieux uniquement).
Investie pendant un certain temps d'une enveloppe charnelle pour jouir de la création de Dieu, notre âme doit apprendre à s'en affranchir par le détachement et la méditation pour retrouver sa vraie nature. Si elle n'y parvient elle n'est pas prête à la libération consistant en une communion totale avec Dieu et subira le sort qu'elle a elle même choisi: la renaissance sous une forme correspondant à ses aspirations.